Almadina Concept

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28.08.2008 - A Méditer . . . : La Botte Secrète de Barack OBAMA

La Rubrique – A  Méditer . . .  :

 

La Collecte de Fonds :

La Botte Secrète de

Barack OBAMA

 

Jamais un candidat à la

Maison Blanche n'avait levé autant de

fonds aussi vite. Le secret de

cette réussite se trouve dans la Silicon Valley.

 

Si Barack OBAMA devient le premier président noir des Etats-Unis, les manuels d'instruction civique ne feront sans doute aucune mention de ses prouesses en matière de collecte de fonds ni des obstacles financiers qu'il a dû franchir dans le seul but de pouvoir rivaliser avec des candidats de la stature de Hillary Clinton. Pourtant, Barack OBAMA ne serait pas là où il est aujourd'hui, s'il ne possédait un don quasi surnaturel pour mobiliser des sommes considérables.

 

Barack OBAMA est un homme politique de talent, tout le monde s'accorde sur ce point, mais ce qui le distingue de ses prédécesseurs, c'est cette capacité à mobiliser l'enthousiasme suscité par sa candidature pour le transformer en voix et en dollars. Trois forces se sont combinées pour favoriser ce phénomène : les effets des lois sur le financement des campagnes électorales, qui ont élargi quantitativement et qualitativement le spectre des bailleurs de fonds, l'émergence du nord de la Californie comme l'une des principales sources de financement démocrate, et la prise de conscience, par quelques hommes d'affaires et spécialistes du capital-risque de la Silicon Valley, que les technologies et les pratiques de gestion qu'ils avaient élaborées dans leur secteur pouvaient bouleverser le paysage politique national.

 

En 2004, Mark GORENBERG décide de lancer une collecte de fonds pour la campagne présidentielle de John Kerry. Associé de la société de capital-risque Hummer Winblad, à San Francisco, il est représentatif d'une certaine catégorie de démocrates aisés du nord de la Californie que la guerre en Irak et les méfaits généralisés du gouvernement Bush ont fait passer de simples partisans à militants engagés. Et parce qu'il pense en termes de réseaux, Mark GORENBERG est représentatif aussi de la Silicon Valley. A l'époque, le grand pôle des technologies sort tout juste de la crise de 2001, mais il ne fait déjà aucun doute que la phase d'expansion suivante viendra des réseaux sociaux du type MySpace ou Facebook qui créent sur Internet de vastes communautés interconnectées.

 

Mark GORENBERG a alors une idée pour mettre ces réseaux à contribution : « Si le montant maximum que peut offrir un donateur isolé est de 2 000 dollars [1 370 euros], explique-t-il, alors les acteurs-clés d'une campagne seront ceux qui se porteront volontaires et diront « Je vais collecter 50 000 ou 100 000 dollars ».

 

Dans la Silicon Valleycomme ailleurs, la défaite de John Kerry, quoique dévastatrice, semble renforcer le zèle des militants. Mark GORENBERG forme alors une équipe avec son amie Nadine NORTH, en charge du recrutement de cadres pour des sociétés technologiques, et se fixe un nouvel objectif pour 2006 : aider les démocrates à reprendre la Chambre des représentants.

 

Sur les conseils de Nancy PELOSI [alors parlementaire pour la Californie et chef de file des démocrates à la Chambre, aujourd'hui présidente de la Chambre], le duo choisit dix scrutins-clés circonscriptions à bon potentiel pour aider les démocrates à s'emparer des quinze sièges nécessaires pour avoir la majorité. Les deux partenaires se demandent alors comment trouver des fonds : la réponse leur est fournie par les sociétés de logiciels. Depuis l'éclatement de la bulle Internet, ces entreprises n'arrivent plus à vendre des systèmes onéreux. Marc BENIOFF, le PDG de Salesforce.com, a trouvé une solution : il a cessé de vendre ses produits au prix fort, comme cela se faisait, pour proposer une formule d'abonnement par laquelle le client paie par petites sommes l'accès au logiciel.

 

OBAMA, UN BON BUZZ POUR LA

SILICON VALLEY

 

 

Nadine NORTH et Mark GORENBERG lui empruntent cette formule pour leur projet de reconquête de la Chambre des représentants. Au lieu de demander d'emblée un gros chèque, comme ils l'auraient fait pour un candidat à la présidence, ils invitent chacun de leurs poulains candidats à la Chambre dans la région de San Francisco, tout au long de l'année, afin que leurs partisans puissent faire des dons modestes mais répétés. En novembre 2006, le duo se classe parmi les plus gros collecteurs de fonds démocrates de tous les Etats-Unis. Au soir du 7 novembre, jour du scrutin, les démocrates ont reconquis la Chambre des représentants.

 

Lorsqu'il entre dans la course à la Maison Blanche, en février 2007, Barack OBAMA  est pour la plupart des Américains un inconnu. Mais dans la Silicon Valley, il incarne un phénomène bien connu : comme dans une start-up prometteuse de la grande époque, il y a là un bon buzz, un argumentaire irrésistible, mais l'argent manque pour faire fructifier le tout. Et ce que tout le monde, partout ailleurs, considère comme les grands défauts du candidat à l'investiture démocrate (sa jeunesse, son inexpérience) est vu ici comme son meilleur atout.

 

Désireux de s'investir dans une campagne présidentielle, Steve SPINNER, 38 ans, homme d'affaires et cadre dans les médias, se porte volontaire pour lever 25 000 dollars. Comme nombre de ses collègues dans la Silicon Valley, il a été instantanément séduit par OBAMA et immédiatement convaincu que c'était sur lui qu'il fallait miser. « Je suis un lanceur de start-up, explique-t-il. Nous prenons des paris mesurés. Nous pouvons mettre beaucoup d'argent dans un projet qui a plus de probabilités d'échouer que d'aboutir, parce qu'il y a toujours un moyen de réussir : si vous avez le bon projet et la bonne équipe de direction, vous pouvez gagner la partie. C'est ce que j'ai vu en OBAMA ».

 

Steve SPINNER s'est donc mis à envoyer des courriels en puisant dans son propre réseau. Il a épluché les profils de ses amis sur LinkedIn, Facebook et MyYahoo pour y chercher ceux qui avaient des chances d'être démocrate et de faire des dons. Son objectif de 25 000 dollars est bientôt largement atteint. Cela lui vaut d'être invité par Penny Priztker, la directrice financière nationale de la campagne d'OBAMA, à rejoindre le comité national des finances pour s'engager à lever 250 000 dollars.

Steve SPINNER est étonné par l'engouement qu'il rencontre partout pour le candidat, mais aussi par l'absence de forum pour en parler. Pour combler cette lacune, il crée donc ce que les habitués du Web appellent un « groupe d'affinité »,www.entrepreneursforobama.com. En mai 2008, la vidéoconférence du candidat avec le groupe remporte un franc succès. Quasiment du jour au lendemain, c'est tout un nouveau réseau qui s'est formé et s'est mis au travail pour le candidat à l'investiture. Steve SPINNER était un néophyte qui jusque-là n'avait jamais levé un centime pour une campagne présidentielle ; aujourd'hui, il a collecté plusieurs centaines de milliers de dollars pour Barack OBAMA.

 

DE NOMBREUX OUTILS DE

COLLECTE DE FONDS

 

Le centre nerveux de la campagne du sénateur de l'Illinois est le site My.barackobama.com, qui fait preuve depuis le départ d'une meilleure maîtrise des nouvelles technologies que tous ses rivaux. Dès son lancement, au début de la campagne, la ligne était claire : le site est une plate-forme de mise en réseau centrée sur le candidat et conçue pour offrir à ses utilisateurs un éventail quasi illimité de méthodes de participation à la campagne.

 

« Nous nous efforçons dans cette campagne de mettre en pratique deux principes, explique Joe ROSPARS, chargé des nouveaux médias pour Barack OBAMA. Le premier est de faire tomber les barrières et de faciliter autant que possible l'accès de tous à notre site Web. Le second, c'est d'élargir la palette des attentes à l'égard de nos militants : apposer un autocollant sur sa voiture, ça ne suffit pas. Ce que nous voulons, c'est que vous donniez 5 dollars, passiez quelques coups de fil, organisiez un événement. Si vous jetez un oeil aux messages que nous avons envoyés aux gens au fil du temps, vous verrez que nous partons du principe qu'ils vont s'organiser ».

 

Mais la véritable idée de génie de My.barackobama.com, ce sont ses nombreux outils de collecte de fonds. On peut naturellement cliquer pour faire un don ou souscrire à la fameuse formule d'abonnement et donner un peu chaque mois, comme ils sont déjà des milliers à l'avoir fait. Mais l'utilisateur peut également paramétrer sa propre page, se fixer un objectif de collecte, bombarder ses amis de courriels pour les inviter à s'inscrire et se rapprocher ainsi de son objectif, ou encore regarder la température monter sur son « thermomètre » personnel de levée de fonds.

 

Pendant les primaires de 2004, Howard Dean avait levé 27 millions de dollars sur Internet. Avant l'été, OBAMA se rapprochait à toute vitesse de la barre des 200 millions. Des sommes colossales qui, à un tournant de la campagne pour l'investiture, se sont révélées décisives. Après le « Super Mardi », le 5 février, les caisses de la campagne de Hillary Clinton étaient vides. M. OBAMA, riche à millions, a pu poursuivre sa route, remporter les onze primaires suivantes et mettre tout bonnement l'investiture hors d'atteinte de sa rivale.

 

Grâce à cette alchimie entre réseaux sociaux et campagne présidentielle, OBAMA peut se targuer aujourd'hui de quelques-unes des statistiques les plus époustouflantes de l'histoire politique : 750 000 militants actifs, 8 000 groupes d'affinité et 30 000 manifestations organisées. En février, son équipe de campagne précisait que 94 % des dons reçus étaient inférieurs ou égaux à 200 dollars, contre 26 % pour Hillary Clinton et 13 % pour John McCain. En mars, Barack OBAMA avait reçu des fonds de pas moins de 1 276 000 donateurs.

La start-up la plus prometteuse de la Silicon Valley ne fera la fortune de personne, mais elle pourrait bien décider du prochain locataire de la Maison Blanche.

Source : Le Monde



28/08/2008
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